Pier Giorgio Frassati, fils du sénateur Alfredo Frassati, fondateur du journal “La Stampa”, naît à Turin le 6 avril 1901. Il a grandi comme un enfant privilégié ayant hérité davantage des qualités que des défauts de sa famille.

Pier Giorgio avait un coeur dont la hantise essentielle était de pouvoir donner, faisant siennes la faim et la soif de justice des autres. Quelques traits de sa tendre enfance sont déjà révélateurs de son caractère : dès l’âge de 4 ans, il est au bras de sa cousine Rita Pierazzi pour voir une procession de la Vierge. Tous les enfants jettent des fleurs ; lui enfile rapidement sa petite main dans la ceinture de dame Pierazzi, s’empare d’un stylomine en or et le lance avec un “tiens” fort et triomphant. Une autre fois, à l’âge de 5 ans, une jeune femme frappe à la porte, elle a sur son bras un enfant pieds nus ; Pier Giorgio enlève à l’instant ses chaussures et ses chaussettes, les lui donne, puis ferme la porte et disparaît pour que personne ne reconnaisse son geste.

Pier Giorgio avait une intelligence hors du commun mais pratique, non spéculative. Il réussit remarquablement ses études d’ingénieur des mines et de sciences politiques. La Pira a écrit de lui: “La figure de Pier Giorgio n’est pas passée sans résonances profondes parmi les jeunes de notre génération, le Seigneur en a fait une lampe qui a illuminé et illumine tant d’âmes de jeunes de cette pureté lumineuse, ouverte, intelligente, sans barrière, apte à révéler à tant de personnes les horizons de la grâce et de la Vérité”.

Il était fort, bâti en athlète, très doué de bon sens et d’esprit. Il était porté à la colère. Dans son enfance combien de coups de poing et de coups de pied a-t-il distribué à ses adversaires? Mais il sut se vaincre. Il sut diriger chaque passion vers le Bien et, quand il eut acquis la maîtrise de lui-même” Dieu lui demanda la vie. Un jour où les fascistes avaient fait l’assaut de sa maison à Turin, ils en furent chassés par Pier Giorgio avec la violence du Christ lorsqu’il chassa les marchands du temple. A cette occasion, le père Philippe Robotti lui écrivait : “J’ai appris par les journaux ta prouesse de chasser les brigands fascistes de ta maison, je t’en félicite vivement”.

Apôtre de la liberté, son intérêt allait aux pauvres, aux déshérités et aux marginaux ; il faisait partie des conférences de saint Vincent de Paul. On lui demanda un jour comment il faisait pour entrer joyeusement dans certaines maisons où la puanteur nauséabonde était le premier accueil, il répondait : “N’oubliez jamais que, la maison a beau être sordide, en approchant un malheureux vous vous approchez du Christ. Souvenez-vous de ce qu’a dit le Seigneur le bien que l’on fait aux autres est un bien que l’on fait à soi-même. Autour de l’infirme, du misérable, du malheureux, je vois une lumière que nous n’avons pas”.

A 18 ans, quand il était à la faculté d’ingénieurs, il a commencé à prendre contact avec l’Ordre des Prêcheurs ; il en a étudié le charisme et, le 28 mai 1922, il recevait l’habit de tertiaire. Il appartenait à la fraternité de Turin dans laquelle un an après il faisait profession. Il prit le nom de frère Jérôme en souvenir et en imitation du grand Savonarole dont il fut un fervent disciple. Il aimait lire ses oeuvres ainsi que celles de sainte Catherine de Sienne et de saint Thomas d’Aquin.

Il se voulut l’héritier du message de Savonarole pour un nouvel ordre laïc, dans lequel se résume la prédication évangélique de cet apôtre qu’il admira dans sa figure morale et sociale, dans sa force de lutteur et de martyr. Le père François Robotti, prieur du couvent au moment de sa prise d’habit, écrivait : “Il m’a demandé de prendre le nom de frère Jérôme, car il voyait dans l’ardent Savonarole un modèle d’austère pureté, de recherche chrétienne de la démocratie et d’ardent apostolat religieux et social. Bien que vivant dans le monde, il voulait imiter ces qualités, spécialement en participant avec ardeur à la vie des associations catholiques de la jeunesse (F.U.C.I.) qui, sous d’autres formes, furent tant aimées du grand réformateur florentin”.

Le père Enrico Rovasenda qui fut son compagnon observe : “Il fut le chevalier de la Vérité. Dans sa vie, dans ses pensées, dans son action, il récusait tout ce qui sentait l’opportunisme ou le compromis ; il ne voulait que la Vérité éblouissante”.

Il respectait chaque opinion sans jamais imposer la sienne. Il était juste, réservé, nullement envahissant, très délicat, il savait en toutes circonstances être un excellent ami, serein et objectif dans ses jugements, avec beaucoup d’indulgence pour les autres et rigueur envers lui-même.

Après avoir envisagé la vie religieuse, Pier Giorgio se décida pour la vocation de laïc consacré selon une formule qu’il cherchait mais n’eut pas le temps de définir. “Pour tout ce que ma vocation m’inspire de faire, il faut que je sois laïc”. Il voulait rester laïc pour pouvoir partager la vie des travailleurs. Il voulait devenir ingénieur des mines pour pouvoir être avec les mineurs qu’il appelait “les parias du prolétariat”. Que n’eut-il pas voulu faire pour ses frères les pauvres! Depuis plusieurs mois, la santé de Pier Giorgio s’était altérée. La séparation de ses parents et différents problèmes l’avaient gravement affecté, il souffrait moralement de façon indicible ; il était devenu presque méconnaissable par sa maigreur. II continuait à multiplier ses visites aux pauvres dans des quartiers malsains. Très affaibli, son corps n’avait plus de résistance. Une poliomyélite foudroyante devait l’emporter en quelques jours. Atteint par le mal, il ne voulut pas s’aliter ; on disait qu’il avait la grippe, finalement il s’écroula paralysé. Il reçut en pleine conscience les derniers sacrements, il eut encore la force d’écrire en termes apocalyptiques une dernière recommandation pour ses malades, puis ce fut l’agonie et la mort le 4 juillet 1925.

L’hommage des pauvres venus nombreux à ses funérailles fut une évidente reconnaissance de sa sainteté. Il a été béatifié par Jean-Paul II le 20 mai 1990. (Source : Chéry, Henri-Charles. Saints et bienheureux de la famille dominicaine. Fraternité dominicaine Lacordaire. Lyon. 1991.)

  • Broché: 227 pages
  • Editeur : Fayard – Le Sarment (1 juin 1998)
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2866790499
  • ISBN-13: 978-2866790493
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